Érotisme
Une médiagraphie réalisée par Médiathèque Nouvelle pour l’accompagnement du lot thématique ‘Littérature érotique’ de la Bibliothèque centrale du Brabant wallon
Julio Medem : Lucie et le sexe (2001)
À la suite du décès tragique de son compagnon Lorenzo, écrivain torturé, Lucia part se réfugier sur l’île de Formentera dans les Baléares. Un décor lumineux qui dégage beaucoup de chaleur et d’espoir pour tenter de se reconstruire. Le cinéaste Julio Medem explore les différentes facettes de leur histoire, entre souvenirs et moments présents. Ces mouvements temporels relient les personnages entre eux, ils prennent une forme sensuelle et sexuelle. Un érotisme qui se diffuse tout au long du film sans jamais être obscène. Une passion qui évolue et qui converge vers la détérioration et le chagrin. (StS)
LUCIA ET LE SEXE
Park Chan-wook : Mademoiselle (2016)
Corée, années 1930. Park Chan-wook adapte le roman anglais Du bout des doigts de Sarah Waters en un subtil et raffiné conte libertin. Son récit dépeint les relations coloniales entre la Corée et le Japon à travers une métaphore sensuelle, loin des clichés traditionnels. Le film puise dans les estampes shunga et l’univers sadien pour créer une œuvre complexe. Les rapports de domination deviennent le miroir des tensions historiques, dans une danse de séduction troublante et libératrice. L’érotisme n’y est jamais gratuit, mais toujours au service d’une mécanique narrative implacable. (DBF)
MADEMOISELLE
Derek Jarman : The Last of England (1987)
The Last of England, de Derek Jarman, est un film-poème hybride qui mêle archives familiales, visions fragmentées et esthétique underground. Tournée en Super-8 gonflé, l’œuvre tisse une vision anarcho-lyrique, traversée de violences intimes, sociales et politiques, au cœur d’une Angleterre thatchérienne à l’agonie. Refusant toute linéarité, Jarman en fait un journal intime frondeur : le corps homoérotique y est mis en scène dans des actes de danse, de désir, de douleur. Il ne s’agit pas d’un érotisme érotisant, mais d’un érotisme déchiré, revendicatif, inscrit dans la crise d’une nation. (DBF)
THE LAST OF ENGLAND
Sophie Hyde : Mes rendez-vous avec Léo (2022)
Plutôt que d’érotisme ou de sexe, il est surtout question ici de plaisir. Du plaisir, Nancy n’en a pas eu beaucoup dans sa vie, ni en tant qu’épouse et mère, ni dans son travail. À 62 ans, veuve et solitaire, elle voudrait que cela change. Elle fait donc appel à Léo, jeune escort, pour réaliser ce qu’elle a du mal à nommer des phantasmes, plutôt une série de cases à cocher. Au fil des rendez-vous et des discussions, les doutes et les certitudes sont remis en question. Rapport aux corps, jeunes ou vieux, honte de soi, jugement, orgasme, simulation, injonctions et normes, autant de sujets peu abordés sous cet angle au cinéma le sont ici sur un ton léger et par un duo aussi séduisant qu’inattendu. (GB)
MES RENDEZ-VOUS AVEC LÉO
Nagisa Oshima : L’Empire des sens (1976)
Diffusé sur les écrans en 1976, le film de Nagisa Oshima suscite encore de nombreux débats de nos jours. Inspiré d’un fait divers japonais dans les années 30, le cinéaste dépeint la sexualité non feinte et complètement assumée d’Abe Sada et Kichizo, une servante et son patron. Une relation torturée, dévoilée vertement afin de dénoncer les courants de pensée autoritaires du Japon de l’époque. Mais pour démontrer également que l’émancipation n’était pas uniquement masculine. L’empire des sens est considéré par beaucoup comme « le plus beau film pornographique du monde ». (StS)
L'EMPIRE DES SENS
Melanie Mayron : Tell Me You Love Me (2007)
Les dix épisodes de l’unique saison de la série Tell Me You Love Me s’immiscent dans la vie intime de trois couples. Un multiple portrait relatant leur thérapie respective chez une même sexologue. Un va-et-vient qui navigue entre désir émoussé, absence de libido et difficulté de concevoir un enfant. Les conflits familiaux. Chaque relation, y compris celle de la thérapeute, est explicitement montrée. Les scènes de sexe sont crûment affichées, mais jamais dans le but de provoquer. D’authentiques impulsions qui sortaient des schémas classiques des séries télévisées de l’époque. (StS)
TELL ME YOU LOVE ME
Stephen Dwoskin : Outside In (1981)
Toute l’œuvre de Dwoskin, cinéaste à la caméra « caressante », né à Brooklyn en 1939, qui a contracté la poliomyélite à l’âge de neuf ans et s’est installé à Londres en 1964, tourne autour du corps – et de son corollaire, dès qu’il est question de corps au cinéma : le regard. D’une approche plus éclatée que ses premiers films, Outside In est une quasi-comédie à plusieurs muses (Olimpia Carlisi, Béatrice Cordua, etc.) qui flirte tant avec le burlesque qu’avec les rituels et le fétichisme. Une femme nue essaie les orthèses et les béquilles du cinéaste tandis que, comme en écho à cette scène, une autre enfile méticuleusement les pièces de cuir de sa combinaison bondage… (PD)
STEPHEN DWOSKIN - COFFRET#1 - DVD#4
Marco Ferreri : I Love You (1986)
Dans cette fable mal accueillie à sa sortie et aujourd’hui très marquée par son époque (looks, décors, et musiques peuvent difficilement être plus ancrés dans la France des années 1980), Ferreri filme un homme très sollicité par la gent féminine (Christophe Lambert) préférant fondre d’amour et de désir pour un porte-clefs ! Derrière ce minuscule objet, ce fétiche, qui répond « I Love You » dès qu’on le siffle, il y a évidemment le fantasme masculin d’objectification de la femme, le besoin de la contrôler et de la savoir docile. Mais il y a aussi, 10 ans avant les tamagotchis et 40 ans avant l’intelligence artificielle conversationnelle, une vision prémonitoire de l’avènement des gadgets relationnels et sexuels. (PD)
I LOVE YOU
Alain Guiraudie : L’Inconnu du lac (2013)
De ses moyens métrages des années 1990 à ses succès récents, en passant par ses romans (le cinéaste est aussi écrivain, et pas juste des scénarios de ses films), Guiraudie a beaucoup mis en scène le désir homosexuel – plutôt à la campagne qu’en ville, plutôt à l’air libre qu’en chambre ou en boîte. Là où les corps rencontrent à la fois d’autres corps et des paysages. Pour L’Inconnu du lac, il filme – de manière frontale, parfois crue et explicite – un microcosme gay sur les bords du Lac de Sainte-Croix, au pied des gorges du Verdon. Des hommes s’y retrouvent pour bronzer, séduire, se baigner, baiser, se regarder baiser… (PD)
L'INCONNU DU LAC
Halina Reijn : Babygirl (2024)
Le film s’attache à articuler des enjeux apparemment contradictoires liés aux problématiques de la sexualité à l’ère post-MeToo. Au fantasme secret de soumission que nourrit son héroïne cheffe d’entreprise, vient répondre un jeune homme capable d’entrer en résonance empathique avec le désir de sa partenaire. Sous ces auspices la rencontre est une première pour l’un comme pour l’autre. Cette nouveauté introduit une forme de maladresse entre eux qui renforce le trouble et l’ambiguïté de la scène érotique. La réalisatrice éclaire son propos en citant Oscar Wilde : « Tout dans la vie est une question de sexe, sauf le sexe. Le sexe est une question de pouvoir. » (CDP)
BABYGIRL
Jane Campion : In the Cut (2003)
Tout ce qui relève de l’inavouable dans l’attirance d’une femme pour un inconnu se condense dans ce qui lie Frannie, solitaire et renfermée, à Malloy, un inspecteur de police, archétype du séducteur dont il y a tout lieu de se méfier – à tel point que Frannie le soupçonne d’être l’auteur des féminicides sur lesquels il enquête. En détournant quelque peu les codes du thriller érotique, Jane Campion scrute sans fausse pudeur cet attrait pour le danger que l’héroïne est amenée à éprouver dans sa chair. Plutôt qu’un rapport de force asymétrique, c’est l’ambivalence même du désir qui est mise en question à travers l’intensité qu’il suscite. (CDP)
IN THE CUT
Chantal Akerman : Je, tu, il, elle (1974)
Deux femmes font l’amour dans une chambre. L’une des deux est interprétée par Chantal Akerman elle-même. Je, tu, il, elle est son second long métrage, juste avant Jeanne Dielman. La séquence, qui survient au deuxième tiers du film, se distingue moins par son sujet — une relation lesbienne — que par son traitement. Filmée en trois plans fixes, elle s’étire sur près d’un quart d’heure, sans progression dramatique, sans préliminaires ni orgasme. Rien n’est mis en scène pour séduire ou provoquer : la caméra accompagne le mouvement de la chair, il ne s’agit pas de montrer, mais de faire ressentir, dans la durée et le silence, ce que peut être l’intensité d’une étreinte. (CDP)
JE TU IL ELLE
Médiagraphie réalisée par Dany Ben Félix, Geoffrey Briquet, Philippe Delvosalle, Catherine De Poortere et Stanis Starzinski.
photo : Jesus Boscan / libre de droits - licence Unspash
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